Grâce à ma logeuse au grand cœur, la nuit fut douce. Si j’avais dû bivouaquer avec le vent, j’aurais été moins en forme pour ce septième jour de marche. Le temps est menaçant, mais les quelques gouttes de pluie restent heureusement anecdotiques.
Le matin, j'embrasse la dernière portion de ce massif sauvage, non pas sans une halte dans la boulangerie locale. Sans complexe, je choisis un pain au chocolat au Nutella et aux noisettes torréfiées. J’ai la journée pour l’éliminer.
Après Pradel-Laval, une brève ascension s'amorce, prélude à une descente jusqu'à 200 mètres. Nous sommes loin des 1200 mètres du début. Le paysage, marqué par les cicatrices d'une époque minière révolue, est un gruyère géant, parsemé de quelques lacs artificiels aux eaux noires. Sur ce chemin solitaire, seuls les pas d'un couple d'octogénaires, au rythme intense, viennent rompre le silence.
En route vers Mas Dieu, leur hameau perché, ils me relatent des histoires aux contrastes saisissants. L'une, sombre et glaçante, raconte le destin tragique d'un huissier, victime de la rage d'un menuisier endetté, jamais ressorti du village en 1934. L'autre, lumineuse , est celle d’un villageois ayant fait fortune aux Amériques, qui, par amour pour sa terre natale, fit édifier la fontaine des Mamans en 1928, offrant aux femmes du village un accès précieux à l'eau.
Lassée par les cailloux incessants de la Régordane, je choisis d'emprunter la petite départementale en direction de Saint-Martin-de-Valvagues. La nature a des allures du Sud : oliviers, asperges sauvages et ifs se multiplient. Alès, la capitale des Cévennes, se profile à l'horizon, et le paysage, hélas, se pare d'une skyline urbaine peu engageante. Je croise quelques kékés en rodéo voiture immatriculée en Pologne. Même le centre-ville, malgré sa cathédrale aux peintures splendides, ne parvient pas à éveiller mon enthousiasme. Je ne prendrai pas de photos par décence ...en raison d’une cérémonie funéraire. Mais j’obtiens le précieux tampon de ma crédentiale.
Le vrai chemin de la Régordane s'achève ici, mais son esprit continue d'imprégner les étapes à venir vers Saint-Gilles. Ce soir, je trouve refuge dans les hauteurs d'Alès. Mes pieds, meurtris par l'asphalte, aspirent au repos. Après tout 257 000 pas en une semaine, c’est pas rien ! Hâte et impatience me tenaillent, me poussant à entrevoir la ligne d'arrivée, de poser les pieds dans mes Birkenstock rose fourrées et d'enfiler une robe… au plus tard dimanche.
Demain passage par Vézenobres où j’espère pouvoir visiter la maison de la figue et son verger conservatoire de plus de cent variétés.
Bluffee par tes 257 000 pas en une semaine !! On ne joue pas dans la même cour... Ma moyenne c'est 3 à 4000/jour ce qui, pour mon âge n'est p'tet pas si mal que ça 😂