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Photo du rédacteurMaya APRAHAMIAN

Le cadeau de Laval

Dernière mise à jour : 17 avr.

Me voilà à mi-chemin de mon périple vers Saint-Gilles. Déjà six jours que je marche. Un cap symbolique autant que physique, qui teinte cette étape d'une nuance particulière. La motivation ne faiblit pas malgré les ampoules et mes lèvres gercées. Les dénivelés s'adoucissent et la sérénité m'envahit.


Passons sur le repas pseudo-créole de la veille, souvenir anecdotique d'une étape. Génolhac, avec ses deux chiens noirs agressifs m'entourant à la sortie du village, restera gravé dans ma mémoire comme un obstacle franchi.


La Régordane, que j'avais envisagée d'emprunter entièrement, est compliquée. De nouveau, des cailloux, un sentier qui n’a rien d’une voie romaine. Je bifurque vers la départementale.


A l'entrée de Chamborigaud, un obstacle inattendu : le pont a succombé à la furie d'une crue séculaire en octobre 2021. Détour par Pont-de-Rastel, l'occasion de découvrir un vieux pont et une forêt de bambous impressionnante.


Le village, coupé du monde touristique par la disparition du pont, porte les stigmates de l'isolement. Les visages des habitants sont marqués, empreints d'une lassitude que la réunion de crise avec le député la veille n'a sans doute pas dissipée.


Prochaine étape : Portes, où un château-fort domine le col. La Régordane, que je retrouve avec soulagement, me libère du ballet incessant des camions sur la départementale.


La forêt s'ouvre et je proteste intérieurement. Le chemin, labouré par un bulldozer, porte les cicatrices d'un chantier forestier. Les ouvriers s'affairent, coupant les arbres comme on cueille des fleurs.


Des panneaux en pâte à sel accrochés aux arbres attirent mon attention. Des questions d'enfants interpellent le passant : "Qu'est-ce qu'un cadeau ?", "Qu'est-ce qui rend heureux ?", "Peut-on vivre seul ?", "C'est quoi, un ami ?". Des interrogations fondamentales qui me font oublier les aspérités du terrain.


Ces mots, apparaissant au gré des virages ainsi que d'autres œuvres enfantines - des oiseaux, de coccinelles, d'escargots et de galets portant des prénoms -, me touchent en plein cœur. Un message simple et puissant, qui me rappelle que le bonheur se niche parfois dans les petits riens.


A Laval-Pradel, je cherche un endroit sûr pour planter ma tente. Une conversation avec la patronne d’un restaurant où je m'étais arrêtée et écoutée par une jeune femme arrivée en même temps que moi. Quelques minutes plus tard, la patronne , me tend le téléphone. C’est la jeune femme, S., - qui travaille au restaurant et est repartie chez elle. Qui propose spontanément de planter ma tente dans son jardin. Mais le destin réserve mieux encore : S. m'invite à loger dans son rez-de-chaussée !


Ce soir, je suis émue par la générosité de cette inconnue, par son geste spontané qui a illuminé cette journée. Et je suis émerveillée par la magie du sentier forestier, par ces questions d'enfants qui ont semé des graines de sagesse sur mon chemin.

Les vrais cadeaux ne se mesurent pas en unité monétaire.


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2 Kommentare


Anik Delpoux
Anik Delpoux
17. Apr.

Merci Maya pour cet émerveillement justifié, aux fondamentaux...aux petits détails qui font souvent le bonheur de l'instant et nous font oublier les turpitudes d'un quotidien futile et trop envahissant...enfin, ce qu'il est devenu avec le temps et les nouvelles priorités induites. J'espère que ta nuit improvisée, mais au combien généreuse, aura été bonne et réparatrice. A bientôt pour la suite...🥰✨

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Maya APRAHAMIAN
Maya APRAHAMIAN
17. Apr.
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Merci, Anik! Super nuit avec de doux rêves !


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