J4 sur la Véloscénie : l‘aventure nous guette dès la sortie de l'hôtel. Moustache a crevé. Fort d'une riche expérience en la matière, mon homme s'apprête à changer la chambre à air.
Mais que vois-je devant la sortie de l'hôtel ?
Un marché…bon d'accord…jusque là, pas de quoi casser trois pattes à un canard. Mais là où toute la magie de la Providence opère, c'est que le premier stand sur le marché est un …réparateur ambulant de vélos. De quoi faire frissonner de joie toutes les moustaches.
En deux temps, trois mouvements, la chambre à air est changée et les plaquettes de frein arrière également. En prime, la seconde roue fixée correctement, ce qui n'était pas le cas à en croire le réparateur… Moustache a un ange gardien !
Nous voilà prêts à lever le camp. La voie verte est sublime, droite et nous avalons les kilomètres comme le foie gras maison de la veille…ou un baba au rhum.
Dans la forêt de la bourse, nous croisons un cueilleur de champignons, anciennement réparateur de vélo… décidément ! Il nous évite 2 km de détour que nous aurions parcouru en voulant braver l'interdiction de passer outre. Nous aurions dû traverser une rivière en l'absence de pont.
À Alençon, ville charmante, une petite page de culture et un coucou à Louis et Zélie Martin, les parents de Sainte-Thérèse mis à l'honneur dans la basilique.
On ne visitera pas le musée de la dentelle bien que celle d'Alençon soit célèbre.
À la sortie de la ville, nous choisissons la variante sportive de la Véloscénie. Et la plus bucolique aussi. En route vers Carrouges à travers la campagne vallonnée de l'Orne. Ça grimpe fort. L'avantage : cela ne dure pas longtemps et les descentes sont savoureuses. Nouveau record battu avec 51 km/h. Que du bonheur !
Deuxième halte de la journée : Carrouges. Le château éponyme est splendide et se targue d'être le deuxième monument le plus spectaculaire de Normandie ! Une réputation amplement méritée.
Dernier tronçon de la journée : nous voici en Mayenne, le département comportant le plus de petits châteaux privés. Un parfum gourmand nous chatouille les narines. Les forêts inciteraient à la chasse aux cèpes. Je suis aux aguets et je dois me faire violence pour ne pas écumer les sous-bois.
Après une course mémorable entre nos quatres montures dans la forêt enchanteresse, nous arrivons à Bagnoles de l'Orne, une jolie station thermale où nos amis se sont mariés il y a trente-neuf ans.
L'itinérance à vélo, c'est musarder. Voilà un terme découvert hier. Et la définition négative me surprend. Musarder : perdre son temps avec des petits riens.
Je propose une réinterprétation.
J'aime la musique et les images poétiques qu'il génère. Les voûtes émeraudes des pistes cyclables. L'écureuil sentinelle interpellé par nos montures. Le renard s'évanouissant à notre tentative de le prendre en photo. Ou ce pommeau de la douche hôtelière de la veille, économisant l'eau en brumisant délicatement au lieu d'arroser agressivement.
Les petits riens font-ils réellement perdre le temps ? Ne le suspendent-ils pas plutôt ?
Sommes-nous tous des musards ou des promeneurs ayant compris que le temps est un présent ?
J'opte pour la muse et les arts en langage des oiseaux.
Rien à voir avec le Château Musar à l'étymologie probablement religieuse, le mouvement musar étant plutôt fondé sur la rigueur que l'oisiveté.
Ghislaine, une de nos premières hôtes avait cité la phrase de Maud Ankaoua, autrice de 'Kilomètre zéro': «Aujourd’hui est un cadeau, c’est pourquoi il s’appelle présent.»
Alors sur le chemin de nos vies, musardons…
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